Les nombreux réfugiés des guerres oubliées

Les nombreux réfugiés des guerres oubliées

Il y a une guerre qui se déroule depuis plus de onze ans en Méditerranée, aujourd'hui largement oubliée, mais dont les conséquences continuent d'être tragiques pour des milliers de personnes, la guerre en Syrie. Là-bas aussi, les Russes se battent. Là aussi, le nombre de réfugiés est effarant.

Au cours de ces trois longs mois de guerre en Ukraine, nous avons vu tant de réfugiés ukrainiens, fuyant la guerre, et nous sommes sentis proches d'eux parce qu'ils sont manifestement semblables à nous. Avec l'avantage de les connaître assez bien grâce aux nombreux travailleurs expatriés, dont la grande majorité réside en Italie depuis des années. Personne, à juste titre, n'a crié à l'invasion lorsque plus de cent mille d'entre eux sont venus en Italie pour fuir les bombes. Mais il existe des réalités moins visibles, et tout aussi pertinentes pour la société italienne.

Par exemple, celui des réfugiés syriens, fuyant une guerre non moins sanglante, qui a fait plus de 500 000 victimes (600 000 si l'on tient compte des disparus), où Moscou a également joué et continue de jouer un rôle important. Et où le Kremlin a également effectué des bombardements.

Il ne s'agit pas seulement de rappeler les autres réalités de cette troisème guerre mondiale "par morceaux" dont le pape François parle si souvent, mais plutôt de mettre en évidence un phénomène considéré à tort comme "résiduel" pour les immigrants de nombreuses nationalités, y compris la Syrie : l'intégration. En effet, on pense trop souvent que certains peuples, en raison de leurs traditions, de leur culture ou de leur religion, ont moins de chances que d'autres de vivre correctement dans notre pays. Mais la connaissance des personnes et des situations rejette les nombreux préjugés et révèle des aspects cachés de notre réalité-pays, voire de notre vie quotidienne.

Peu à peu, pour de nombreux étrangers, l'Italie devient leur maison, habitée non plus comme des invités mais comme des citoyens, avant même d'obtenir la citoyenneté. Je parle des nouveaux arrivants et pas seulement de ceux qui y aspirent et y auraient droit - parce qu'ils sont en Italie depuis des années - si une loi sur la citoyenneté pour le moins archaïque était modifiée.

C'est l'histoire de Moussa, qui est arrivé avec les couloirs humanitaires mis en place par la Communauté de Sant'Egidio et les Eglises évangéliques. Vendredi matin, il était également à l'aéroport de Fiumicino, mais du côté opposé : pas avec les autres réfugiés, ses compatriotes, une quarantaine de Syriens qui venaient d'arriver par avion du Liban, sauvés d'un abime dans lequel ils risquaient de rester pour on ne sait combien de temps encore, tentés chaque jour par des voyages en barque, sur la Méditerranée. Il se trouvait avec les volontaires qui attendaient à l'aéroport pour accueillir ces personnes et les accompagner dans leurs nouvelles maisons, pour traduire de l'arabe ce qu'elles disaient et faire les honneurs.

Parce que Moussa, qui est arrivé en Italie il y a quatre ans avec les mêmes couloirs humanitaires, parle maintenant notre langue, est soudeur dans un atelier d'extraction de pétrole et loue une maison à Mantoue, où il est prêt à accueillir son frère qui vient d'arriver de Beyrouth avec les quarante autres. L'histoire de Moussa est celle de nombreux Syriens qui ont fui l'"autre" guerre "russe" et sont présents dans nos villes.

Certains sont même devenus un peu célèbres. Et le cas d'Afisa. Il travaille comme barbier, dans le centre de Rome, derrière Montecitorio, à côté des palais du pouvoir. Arrivé en Italie il y a cinq ans, il travaille si bien que même les hommes politiques et d'autres personnalités connues se rendent désormais dans son salon. Nous pourrions également parler d'un de ses compatriotes, Nour, qui est arrivé par un couloir humanitaire " spécial " (du camp de réfugiés de Lesbos avec l'avion du pape François) en avril 2016 et qui est maintenant biologiste à l'hôpital Bambin Gesù.

C'est un système qui fonctionne, celui des couloirs humanitaires, d'ailleurs totalement autofinancé par la société civile : si quelqu'un vous donne un coup de main au début, tout devient plus facile, à tel point que l'intégration devient possible rapidement même pour les derniers arrivés. Avec des progrès significatifs à noter : désormais, en plus des Italiens, les anciens réfugiés eux-mêmes, une fois installés, ouvrent également leur maison à l'hospitalité.

Sont-ils les signes d'un succès ? Il s'agit plutôt de signes d'une normalité vertueuse, qu'il faut toutefois connaître et faire connaître également dans l'intérêt de cette plus grande cohésion sociale que nous essayons laborieusement de mettre en place après l'expérience douloureuse de la pandémie et maintenant de la guerre en Ukraine.

Article paru dans La Nuova Sardegna
[traduction de la rédaction]


[ Marco Impagliazzo ]